Submissions from 2015-07-15 to 2015-07-16 (3 total)

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Une douleur sans nom lui traversa le coude droit. Sur le coup, il fut incapable de savoir ce qui venait de le blesser, mais il comprit qu'un autre homme se tenait à sa droite, pile dans son angle mort, et venait de lui planter quelque chose dans le creux du coude, lui faisant lâcher au passage son arme.

Cyranno balança malgré tout son bras blessé dans cette direction pour l'écarter et prendre un peu de recul, mais, tout en restant invisible, son assaillant le frappa violemment sur le côté de la tête. Cyranno tituba, et tenta de rouler par terre pour s'éloigner, mon son adversaire ne lui laissa aucune chance. Tout en lui retournant le poignet d'un coup sec, son ennemi, qui portait une combinaison blanche lui aussi, lui décocha un coup de pied en plein dans le front sans lâcher le poignet cassé.

La tête de Cyranno fut projetée en arrière, les yeux braqués vers le ciel. Son bras lui semblait presque hurler de douleur tant il lui faisait mal. Le jeune flic avait lu quelque part qu'une sensation de douleur trop intense pouvait parfois mettre quelques secondes à arriver au cerveau, mais là, rien ne lui été épargné. Pourtant, même si il sentait ses esquilles d'os comme lui brûler l'intérieur du poignet comme de la grenaille chauffée à blanc, même si son coude malmené semblait pulser douloureusement tout en éjectant un flot continu de sang, même si la sensation de mourir se rapprochait de lui comme il y a 5 ans, il ne pensait qu'à une chose.

"Le ciel est bien bleu aujourd'hui."

Malgré une journée précédente plutôt pluvieuse, le ciel qu'il contemplait était vide de nuage, le soleil se trouvait encore assez à l'est pour n'être visible nul part dans son champ de vision. Aussi, pour lui, en ce moment le ciel était parfaitement bleu. Plus que le ciel d'ailleurs, c'était son univers tout entier qui se résumait au bleu. Il n'entendait plus rien, les deux coups qu'il avait reçu sur la tête semblait lui avoir coupé le son. Lentement, sa douleur semblait aussi s'atténuer, faisait place à une sensation étrange de noyade.

"Noyade ?"

Cette impression étrange tira Cyranno de sa torpeur. Il n'était plus dans la même position : son corps était arqué en arrière, et son bras droit avait été relâché. Cyranno fit appel à son instinct pour comprendre sa situation : il était maintenu en arrière par son adversaire, qui l'étranglait consciencieusement avec une sorte de lacet, tout en le maintenant à genoux en marchant sur l'une de ses jambes. Quelques secondes seulement s'étaient écoulées depuis le coup de pied qu'il avait reçu.

"Il ne veux pas que je le vois, il ne veut pas qu'on nous entende."

Le premier type, qu'il avait essayé de braquer, avait disparu pendant la bagarre. Il ne sentait sa présence nulle part. Il devait penser que son complice serait capable de se débrouiller seule dans sa sombre besogne.

Sous la colère, Cyranno se jeta en avant, utilisant son dos comme levier pour projeter l'inconnu devant lui, quitte à écraser sa propre gorge au passage. Il ne ressentit aucune résistance, son adversaire venait d'anticiper ce baroud d'honneur en lachant tout simplement le lacet. Cyranno en profita pour se jeter en avant sur son unique jambe libre afin de se dégager, mais une fois encore, le résultat ne fut pas celui escompté. Un coup de pied dans le dos d'une puissance inouïe le jeta de quelques mètres en avant. Cyranno compris que ce coup de pied était destiné à sa tête et qu'il l'avait dévié en se redressant.

"Il faut que je le vois, il faut que j'appelle à l'aide, il doit encore y avoir des policiers dans l'immeuble même."

Mais sa gorge était en feu, et rien ne voulait sortir. Cyranno avait arrêté de respirer depuis bientôt une minute, et tout son être lui réclamait de l'oxygène. Ses muscles étaient plus durs que de la pierre, et chaque mouvement lui vriller la tête, tant la douleur était insupportable. Ses yeux ne voyaient presque plus rien, rien que des flashs lumineux oscillants entre blanc et bleu. L'absence de son avait été remplacée par les battements furieux de son cœur, qui s'accrochait désespérément à la vie. Cyranno se retourna en reculant, pour voir où se trouvait son adversaire. On éclair blanc passa sous son champ de vision : l'homme qui essayait de le tuer venait de lui donner un coup d'épaule en plein dans le ventre et continuait à avancer malgré tout, soulevant les 80 kg de Cyranno comme si celui n'existait pas.

"Tu crois..."

Cyranno serra son poing gauche.

"...que tu peux te débarasser de moi comme ça, SALOPARD ?!"

Il leva le bras et abattit son poing directement vers le dos de l'homme en blanc. C'était un mouvement qu'il s'était entraîné à faire souvent. Fan de films d'arts martiaux, il avait pendant son enfance régulièrement imité ses stars préférés frappant des tuiles à mains nues. Bien que s'étant plus souvent casser le poing qu'autre chose, il avait développé sa force physique pure uniquement à l'aide d'entraînements stupides de ce genre. Et ce genre d'exercices débiles avaient fini par porter ses fruits : pendant les entraînements au close-combat qu'il avait suivi en essayant de devenir flic, il avait battu des experts en arts martiaux uniquement par la force brute. Cyranno n'avait pas vu son adversaire correctement une seule fois pendant tout le combat, mais il était certain que son coup pouvait lui faire mal, ce n'était pas le genre de coup dont on on ressortait indemne. Et pourtant ...

"Le ciel, encore ?"

Cyranno volait, son poing n'avait rien atteint, et il ne ressentait plus rien à nouveau. Son univers s'était à nouveau réduit, en une bande bleue entourée de noir qui rétrécissait lentement. Il compris ce qu'il se passait quand la puissante sensation qu'il éprouvait et qui avait éclipsée toutes les autres se précisa : il tombait en chute libre. Arrivé au bord du toit, son tueur s'était tout simplement arrêté pour le laissé basculer par dessus le rebord.

"Il faut que j'arrête ma chute."

Cyranno ne pensait à plus rien d'autre. Plus que l'humiliation, plus que la douleur, plus que la haine et le mépris des autres dont il avait fait son identité, une seule pensée, une seule phrase lui venait à l'esprit.

"Je veux pas mourir."

Il étendit sa seule main valide vers la bande bleue qui s'éloignait de lui, comme pour la rattraper.

"JE VEUX PAS MOURIR !"